Le Pouvoir par Naomi Alderman

Ana Tijoux – Antipatriarca

Couverture Le pouvoir
Le pouvoir
est un roman de science-fiction écrit par Naomi Alderman et publié aux éditions Calmann Lévy en 2018. Il comporte 400 pages.

Et si les femmes prenaient enfin le pouvoir dans le monde entier ?
Aux quatre coins du monde, les femmes découvrent qu’elles détiennent « le pouvoir ».
Du bout des doigts, elles peuvent soudain infliger une douleur fulgurante – et même la mort.
Soudain, les hommes comprennent qu’ils deviennent le « sexe faible ».
Mais jusqu’où iront les femmes pour imposer ce nouvel ordre ?

 

***

Ces derniers temps j’ai pas mal vu passer ce livre sur la blogo, mais il ne m’intéressait pas vraiment, je pensais que c’était un manifeste sur mai 68 allez savoir pourquoi. Et en creusant un peu j’ai découvert que cela concernait la condition des femmes et, étrangement, cela a commencé à davantage m’intéresser. Aussitôt trouvé, aussitôt lu et je vous en parle de suite !

Je vais commencer par dire que ce livre m’a incroyablement marquée, tant par son écriture que ces personnages ou les sujets abordés. C’est un roman riche qui ne parle pas de la condition des femmes sans raison, mais surtout pour traiter d’un sujet de fond : le pouvoir. Qu’il soit politique, médiatique, économique, religieux… l’autrice le traite de multiples manières et avec justesse. Elle va aborder chaque cas du point de vue des hommes, puis des femmes et ce qui est intéressant c’est de voir que le problème fondamental est le pouvoir et non pas le genre de celui qui l’exerce. Ça m’a fait du bien de le voir écrit noir sur blanc. Que ce soit un homme ou une femme, les dérives de ce pouvoir seront bien différentes, mais vont néanmoins créer un sacré chaos.

« Être une femme », nous en avons souvent discuté, est inextricablement lié à la force, l’insensibilité, la peur ou la douleur qu’on attend de nous.

L’histoire va se passer sur plusieurs périodes : la première de 10 à 8 ans avant, la seconde de 6 à 5 ans avant, puis, un an, sept mois & enfin, la « période fatidique ». Ce qui est dingue, c’est que plus on avance dans l’histoire, plus on se rend compte du temps qui passe, des évènements qui se produisent, de l’empowerment (si on peut vraiment utiliser ce terme ici) qui s’affirme petit à petit, et c’est à glacer le sang. On se rend compte de la situation initiale dans certains pays, qui ressemble beaucoup à ce qui se passe à l’heure actuelle (mais j’y reviendrai), et la métamorphose en moins de 10 ans est vraiment affolante : on assiste à un total retournement de situation ! Les droits dont les femmes étaient privées 10 ans auparavant se retrouvent acquis et supprimés aux hommes et les réactions sont relativement différentes. A ce sujet, une protagoniste dit quelque chose qui m’a profondément marquée : « Dans notre pays, une femme n’a pas le droit de conduire. Les femmes savent pas y faire, avec les voitures » . Il y a comme une sorte de résignation et en même temps de sarcasme qui m’a bien plu. Mais, par contre, les femmes auraient beau protester pour que la situation change, rien n’aurait bougé. Or, dès lors que ce droit est enlevé aux hommes c’est comme s’il y avait une prise de conscience, ils ne trouvent pas cela normal. Et ce processus m’a beaucoup intéressée, il s’applique également dans beaucoup d’autres de situations.

Pour revenir à ce que je vous disais juste avant, j’ai eu le sentiment que ce qu’il se passait dans ce roman pouvait se passer également de nos jours. Bien entendu, toute l’histoire d’étincelle mise à part ou pas, j’adorerai manipuler l’électricité comme ça. Dans un sens, certains droits dont les femmes sont privées au début du roman se vérifient actuellement : dans certains pays, le droit de vote des femmes n’a été acquis que très récemment, les femmes ne peuvent pas conduire, avoir un emploi… En fait, le roman dans certaines situations, part de situations existantes et les extrapole, les modifie à terme et c’est ce qui me l’a rendu réaliste. En cela, j’ai repensé à la servante écarlate : la soumission des femmes se fait progressivement : d’abord restriction des droits par l’état d’urgence, puis, licenciements, suppression des comptes bancaires… Dans Le pouvoir, c’est bien l’inverse, mais cela part du même postulat.

Au début, nous taisions notre douleur parce qu’elle n’était pas virile. Aujourd’hui, nous continuons à la taire par peur, par honte, et parce qu’on se sent seul et désespéré, chacun dans notre coin. Il est difficile de préciser à quel moment ces dernières raisons ont pris le pas sur l’autre.

Mais recentrons-nous sur les personnages ! On part de 4 personnages récurrents, puis, à mesure des périodes, on en rajoute quelques uns jusqu’à à terme, avoir leurs histoires qui s’entrecroisent. Évidemment, on finit par s’y attacher, même s’ils sont bien loin d’être parfaits !
D’abord il y a Allie, si ce n’est pas d’elle que tout part, ce n’est pas loin. Elle s’est émancipée petit à petit de sa famille d’accueil jusqu’à devenir une personnalité centrale pour l’intrigue. Ses choix m’ont parfois déroutée surtout au démarrage, je ne comprenais pas réellement le pourquoi du comment. Ce qui reste indéniable par contre, c’est qu’elle est dotée d’une forte personnalité.
Puis, il y a Roxy. Elle est la protagoniste que j’ai préférée suivre : forte, courageuse, frondeuse et dotée d’un grand sang froid, elle encaisse tout ce qui lui arrive et garde chaque chose en mémoire pour se venger ensuite. Stratège et calculatrice, elle évolue dans un monde de requins et ses réactions me l’ont rendue totalement attachante.
Par la suite, nous rencontrons Margot et Jos. Margot, au cœur du système politique, va œuvrer pour que des jeunes filles aient des centres d’entraînement pour apprendre à canaliser leurs pouvoirs et Jos, sa fille ne parvient pas à contrôler le sien.
Nous rencontrons également Tunde, un jeune homme qui va couvrir les évènements partout dans le monde en tant que journaliste, prendre des notes pour élaborer un essai sur tous les changements qui se sont opérés au fil du temps. Il prend parfois de gros risques pour couvrir au mieux l’actualité et parfois à mis sa vie en danger.

Savoir, c’est déjà être libre

Par ailleurs, l’histoire adopte un format assez particulier puisque l’on suit un roman… dans un roman ! C’est déroutant au démarrage, on se sait pas trop dans quoi on s’embarque, mais une fois qu’on a le fin mot de l’histoire, c’est vraiment plaisant.

Bien entendu, puisque j’ai lu le livre en français, je n’ai pas le style original, cependant j’ai trouvé l’ensemble très fluide et si au démarrage j’avais un peu de mal le temps de rentrer dans l’histoire, je ne pouvais pas lâcher le livre par la suite et je suis ressortie très conquise par l’ensemble.

En conclusion : ♥♥♥♥♥ Le pouvoir est un roman que je vous incite à lire tant par son message de fond que sa forme. On ressort avec un autre regard de notre lecture et c’est super agréable.

Une petite dernière pour la route :

« Aucun homme n’est autorisé à sortir de l’argent ni aucun autre bien du pays. » […]
 » Les hommes ne sont plus autorisés à conduire »
 » Les hommes ne sont plus autorisés à posséder leur propre entreprise.
« Les journalistes et photographes étrangers doivent être employés par une femme ».
« Les hommes ne sont plus autorisés à se réunir à plus de trois, même à la maison, sans la supervision d’une femme. »
« Les hommes n’ont plus le droit de voter – toutes ces années au cours desquelles ils ont imposé leur violence et leurs humiliations ont démontré qu’ils sont inaptes à décider et à gouverner. »
« Toute femme qui prend un homme en flagrant délit de bafouer l’une de ces lois est non seulement autorisée mais tenue par la loi de le punir sur-le-champ. Sous peine d’être considérée comme une ennemie de la nation et une complice du crime. »

https://malecturotheque.files.wordpress.com/2017/11/cli6a-lc3a9chiquierdumal_dansimmons.png?w=300&h=300

Par Nina


5 réflexions sur “Le Pouvoir par Naomi Alderman

    1. Oh je te remercie ! J’ai pris beaucoup de plaisir à la faire 🙂
      Nous sommes d’accord ! Je trouve qu’elle est une fille forte qui s’impose beaucoup alors qu’il n’est pas toujours facile de faire sa place ! Elle est une femme forte parmi des femmes fortes en fait ^^

      J’aime

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